samedi, juillet 07, 2007

Four Seasons in One Day


Des vapeurs lourdes et noires enveloppent la crique de cette mysterieuse lumiere d'apres-orage. Les maisons de vacances, ca et la, a moitie masquees par les Pohutakawa trees, prennent sous la tempete de juillet un air de vieille raquette de tennis en bois et aux cordes derangees, attendant dans le grenier la prochaine generation.


Au loin, dans un horizon que je ne peux que deviner, de silencieux rais de lumiere percent le ciel et sont suivis bien apres d'un bourdonnement rassurant, indiquant quer la temete est passee. Sur cette ile, il y a 600 ans a peine un volcan en furie, je suis venu en bateau. Je suis a pieds, maintenant. Peu importe, il n'y a pas de routes sur l'ile et le sol est tiede, la pierre noire chauffee par une longue journee de soleil.


Il y a un mois, alors que je parcourais les routes de l'est de l'ile du Nord, le Zircon rendait l'ame dans un dernier rale. L'evenement ne me parut alors pas trop catastrophique, comme si je devais m'attendre a de bonnes surprises.

En l'occurrence, les choses se sont ensuite precipitees. Etre a pieds nus rend plus vulnerable, et donc une victime ideale de la bonte des gens.


Comme je suis au bord de la route en train de me demander comment je vais amener le Zircon jusqu'au prochain cimetiere, une jeep s'arrete, chargee d'une grand-mere et de ses quatre petits enfants. Un morceau de famille maorie que je decouvrirais plus tard etre plus accueillante que je n'en ai jamais pu etre temoin. Je suis invite au hangi familial - viande cuite traditionnellement dans un trou rempli de pierres chauffees au feu de bois - ou j'experimente tous les plaisirs de la vie festive maorie: hongi, (salut maori nez-a-nez), biere locale, herbe locale, ambiance locale. Les touristes japonais payent des centaines de dollars pour vivre ca dans un village maori reconstitue en centre ville.


Un peu saoul, je m'endors pour la derniere fois dans le Zircon, pour le lendemain prendre la route; a pieds, cette fois.
Le soleil et le sac sont si lourds que je suis oblige de tendre le pouce dans l'espoir d'un lift. Aussitot, je suis pris par un capitaliste evangeliste americaniste raciste macho pro-israelien au grand coeur qui m'accueille pour la nuit et me fait gouter de sa delicieuse viande de cerf chasse dans l'ile du sud. Moi qui avais decide de ne plus acheter de viande, me voila servi avec, dans la meme semaine, du sanglier, du poulet et du cerf, tous issus de la chasse ou de l'elevage "maison".


Je reprends la route en me disant que je suis un sacre chancard, et atterrit sous la pluie sur une plage gigantesque et desertee ou je plante la tente. Un festin de coquillages locaux et de nouilles en sachet m'attend.


Je prends cette douce habitude, en evitant les backpackers, de planter la tente ou bon me semble, sur une plage photogenique au milieu des dauphins ou dans un jardin ou je suis enthousiasmement accueilli par une bande d'ados sans parents pour le weekend.

Puis, un regard a l'agenda me rappelle que je n'ai plus que deux semaines. Le temps de monter aussi loin au nord que possible, toujours le soleil d'hiver dans les yeux et le vent froid du sud dans le dos. La, la terre est presque oubliee des touristes et seuls moutons et vaches y ont quelque droit. La cote, elle, comme partout, se transforme peu a peu en riviera betonnee et perd doucement de sa beaute. Destin aujourd'hui cliche d'une de ces terres dont la beaute ne peut qu'etre spoliee par les hommes.

Puis, enfin, la vibrante Auckland m'ouvre les bras. Capitale du capital neo-zelandais, petite New-York de sous l'equateur. Les gratte-ciels se serrent les uns aux autres et etincelent de leurs vitres opaques rendues miroirs par la lumiere du soleil.

A quelques dix kilometres de la ville en bateau, un jeune volcan endormi s'eleve, une ile minuscule qui n'a d'habitants que certains touristes d'un jour.



Alors que le dernier ferry du jour quitte le flanc du rocher, un homme ecrit ses memoires au sommet, attendant que l'ile se vide pour pouvoir regagner le preau de la jetee et y passer une nuit calme et surprenamment tiede. Pendant quelques jours encore, un ermite veillera sur l'ile deserte, scrutant tantot la ville lointaine qui, au coucher du soleil prend des allures d'une Istambul trop souvent peinte aux murs des marchands de pittas; tantot scrutant les cieux, tentant de deviner lequel de ces avions sera son dernier vaisseau.