mercredi, janvier 24, 2007

Un bon exemple d'asemantisme introspectogene

Christchurch. Comme a l'habitude, je parcourais Barbadoes Street vers les collines pour me rendre au supermarche. Dans la distance, la ou Barbadoes St. rejoint Moorhouse Av., cette enorme masse jaune, comme une gigantesque boite a chaussures deguisee en abeille, grandit a mesure que j'avance vers le sud.
Comme a chaque fois, la grosse boite jaune affiche cette phrase etrange: "Grab ya cossie and head to Aussie". En grasses lettres noires, comme une injonction. Seulement, ces mots sont pour moi un mystere.
Aujourd'hui, ces rues sont miennes, je peux deambuler sans penser au chemin emprunte et pourtant arriver a destination. Je peux predire les feux aux carrefours, m'insinuer dans cette circulation, repondre en kiwi a un Kiwi. Mais cependant que je deviens de plus en plus expert de cette ville et de ses habitants, l'encontre de cette phrase, au moins trois fois par semaine, me met dans un etat particulier. Le sens absent de ces mots singuliers me replonge quatre mois en avant, lorsque j'etais encore completement perdu dans cette ville. Comme pour me rappeler que je ne suis ici qu'un etranger, ces mots reviennent toujours.
Grab ya cossie and head to Aussie. Sonorites et images sans aucun sens. Je me sens alors isole et inconfortable, comme si je n'avais acces qu'a un nombre limite de secrets. Comme lorsque, autour de moi, des gens parlent de drogues que je ne connais pas. Comme lorsqu'ils partagent des choses dont je ne peux etre temoin qu'a distance.
Grab ya cossie and head to Aussie sonne enfin comme cet espace vide, cet eternelle question au sujet de ce qu'on n'est pas, cet Autre intangible et mysterieux.
Ces grosses lettres sur fond jaune sont effrayantes de non-sens. Elles me condamnent, par leur vacuite, a n'etre que ce voyageur qui ne reste qu'a la surface des choses. Elles me condamnent a m'arreter a l'image pour en ignorer le sens. Est-ce heureux? Quoi qu'il en soit, je finis par me complaire dans ce jeu et ces lettres, a la fois son et image, ont fini par entrer en moi et participer a ce qui me constitue, ce puzzle en mouvement constant etrangement construit, non pas a partir ces bords comme le veut l'usage, mais du centre; et chaque nouvelle piece vient compliquer le jeu. Surtout si elle est asemantique.
Ainsi, disais-je, je me complaisais dans ce jeu de construction, tant et si bien qu'un jour, sans meme y penser, comme si mes levres agissaient sans demander leur reste au cerveau, je me suis surpris a poser la question a un kiwi. Probablement la question n'attendait-elle aucune reponse, l'enigme trouvant son interet avant le denouement seulement.
Mais la curiosite, l'avidite, ce besoin de s'emplir sans cesse de choses nouvelles, contrebalancaient cette envie de vide. Et la reponse apparut toute simple. "Prends ton maillot et vole en Australie". Aussi simple que ca. Un slogan publicitaire, sans plus. Une de ces phrases pensees par des professionnels afin de bloquer le cerveau humain. Un de ces leitmotivs visant a focaliser l'attention sur une evidence plate et ennuyeuse, afin d'eviter le questionnement, le desequilibre, le vide, le suspens.
Les publicitaires avaient echoue. Peut etre une personne sur un million, seulement, avait vide ces mots de leur sens et utilise leurs sons et images pour creer un univers en desequilibre, pour creer une porte d'entree vers cet Autre que l'on croit si distant.
Merci aux agences de voyage pour m'ouvrir l'esprit.

Les tribulations du Zircon en Baie Doree

Tout d'abord, bon vent a ce fils du voyage qu'est Santiago. Qu'il sache combien il a ete courageux et fort de partager ces mois en ma compagnie et avec mes crises pre-cafe/repas.
Bon retour... Embrasse bien tout le monde... Et puis par pitie ne tue personne avec tes projets de malade ;-) Du moins pas avant mon retour!

Bon, passons aux choses serieuses...

Il est quelque part sur cette planete une terre ou mer, soleil et montagne se marient dans une harmonie au-dela de lentendement humain. De ci, une vegetation presque tropicale couvre les roches et se fait ecrin pour toutes sortes d'oiseaux rares; de la, un animal singulier que l'on appelle Homme embrasse chaque matin le sol sacre en y puisant cette vie qui le fait aimer et mourir heureux.
Cet Eldorado, l'on n'y accede qu'a force de courage et perseverance. A moins d'y venir en bateau, il faut au voyageur temeraire une bien fiere monture qui se voudra capable d'escalader "la colline", avant de trouver repos dans l'herbe verte et tiede.
A bord de son fier Zircon, notre heros avait releve le defi. A l'autre bout de la Takaka hill l'attendait une experience bien particuliere. L'idee etait simple et sans equivoque possible: en echange de quelque sustentation alimentaire et d'un lit, il travaillerait la terre.


Il fut accueilli a bras ouverts par les habitants de cette Baie Doree. Au bout d'un long chemin en graviers (le lecteur assidu est maintenant familier avec ces gravelroads), vit un couple de hyppies a la retraite. Leur vie, jour apres jour, s'est forgee au fil des rencontres parmi les plus inattendues et les plus inesperees. Ainsi Bruce a-t-il tour-a-tour ete mecanicien au Canada, Luthier a Rome, guitariste aux USA et improbable fiance d'une princesse indienne a Delhi. De meme, Jessica a-t-elle ete baroudeuse solitaire en Amerique Latine, en espagne et en suisse, enseignante a Londres sous l'aile des premiers disciples de M. Rudolf Steiner, et enfin a-t-elle rencontre Salvador Dali a Barcelone.
Aujourd'hui, a soixante-cinq ans accomplis, ils s'installent dans cette Baie Doree et y construisent leur maison de boue et de paille. Et au fond de leur coeur vibrant, chaque matin, naissent de nouveaux projets insenses.
Ainsi notre heros redecouvre-t-il les joies du jardin dans ce paradis terestre. Le tui curieux - tant adore qu'il prete meme son nom a une biere - chante ses complexes melopees au jardinier agenouille. Ou en serait la musique classique aujourd'hui si Beethoven avait ete kiwi? Effraye par une brouette, sans doute un peu coupable de son diner de jeunes pousses, le pukeko s'envole, gauche et veule, vers un autre potager sans doute.





Deja, le soleil est au zenith et le dejeuner se fait pretexte a la reunion de ce couple et de leurs jeunes recrues. Stina, Ting-Ting, Akiko et Antoine.














Jessica se dit initiatrice du mouvement "slow
cooking", et notre heros decouvre les joies du slow eating, du slow digesting ainsi que celles d'une assiette sans viande - qui l'eut cru? Et tout cela vient de la terre.
Une sieste, un peu de guitare ou de dessin, un bain hilarant dans une mer tantot demontee, tantot mirroir, puis quelques heures encore de compostage, de triage de boulons et. deja, le soleil se cache derriere le mont Para-Para. L'on y apprend a ne pas utiliser sa montre. Chaque arbre, chaque pic ou crete est un repere faisant du soleil un indicateur precis du temps qui passe.



Un nouveau diner se profile a l'horizon, puis ris et chants, tendresses et contemplations du ciel etoile drapent nos camarades dans un sommeil savoureux.

La vie prend son temps, en Golden Bay, les journees y sont longues et bonnes.
Noel, s'il se fete, se celebre au sommet du mont Para-Para, et le cadeau au pied du sapin est un lever de soleil inoubliable, ou les nuages font l'amour avec les arbres. Pour
sur, le solstice d'ete, lui, sera fete: recolte de coquillages gonfles de vie et festin de roi sur feu de bois celebrent le jour le plus long de l'annee.
Puis, car aucun ecrin n'est vraiment ce qu'il semble etre de l'interieur, le monde du dehors rappelle nos heros
a d'autres missions: l'une, un retour en auditoires, l'autre, un vol vers Vienne, et celui-ci enfin qui ecrit ces lignes, l'appel du voyage.
Comme un sas entre Golden Bay et retour a la vie citadine, le reveillon sera celebre sur une plage, dans le parc Abel Tasman. Pour les douze coups de minuit, aucun pied ne touchera le sol, suspendus dans une mer ou les nuees de planctons repondent a la lune.
Pour l'occasion, Aletta - la couchsurfeuse de Christchurch (voir archives Octobre 2006) - rejoint la petite caravane. Le Zircon est alors fier de constater qu'il peut supporter a son bord quatre demoiselles, un chauffeur et un auto-stoppeur.
Aux premiers jours de 2007, le petit groupe se disloque petit-a-petit, et ils restent deux a
grapiller encore quelques derniers instants d'insouciance ensoleillee a voyager lentement vers Christchurch.



L'incontournable Jazzfestival de Nelson et l'escalade, en trois jours, de l'intimidant Mt. Robert retiennent nos camarades un peu plus a l'ecart de la civilisation.
Ainsi furent les derniers moments de 2006 et les premiers jours de 2007 pour notre heros. Est-ce le lieu des resolutions? Est-ce juste une parenthese? Il faudra sans doute qu'une vie entiere se passe pour que
notre heros oublie ces moments, ces cueillettes, ces amities.






PS: Je me dois d'etre honnete: la photo du pukeko et celle du tui ne sont pas de moi... Merci google!

vendredi, janvier 19, 2007

La condition humaine...

Apres 5 mois de voyage, le retour sur la Belgique s'annonce pour moi. De son cote, Antoine continue son aventure au pays du long nuage blanc... Je reprends mon avion le 29 janvier, mais en partant avec l'esprit tranquille, et heureux d'avoir voyage dans ce pays aux multiples facettes, a l'etonnnement sans cesse renouvelle. Mais je me dois de vous expliquer les raisons de mon retour.

Non, je ne me dis pas, comme le ministre Darden, un "Grand democrate". La Democratie de nos societes industrialisees, utilisee comme un ecran de fumee soporiphique, ne m'a jamais satisfait. Elle se targue de donner le pouvoir au peuple, mais elle l'en exclut par son essence meme. La lenteur des prises de decisions conduisent a des catastrophes humaines, et il en coute finalement toujours aux plus fragiles, les laisses pour compte de nos villes et villages.
L'anarchisme, cette idee folle qui se disait 'sans dieux ni maitre' a quelquechose d'interessant, en ce sens qu'elle privilegie la violence pour tout changement societal. Un changement, voila ce qu'il nous tarde, voila notre messie dans son acception moderne tel que nous l'attendons. A nous de voir si nous sommes prets a accepter la violence physique, apres des siecles de guerres sanglantes ayant ravagees nos contrees.
Les dictatures eclairees de l'ancienne Europe rendaient le peuple heureux, mais avec le danger de perdre le controle du dirigeant, et de voir sa lumiere s'eteindre sur son peuple.
Ainsi, a mi-chemin entre une democratie branlante et une dictature personnalisee et sans controle, "Un conseil des sages eclaires", me parait une solution plus qu'envisageable. Elle constitue meme a mon sens, la seule issue favorable pour nos societes humaines. Les personnes constituant ce super-gouvernement ne seront pas elues, mais plebiscitees par le peuple. Ces dirigeants seront des hommes de bien, et n'auront pas a prouver leur valeurs et leur resistance a la corruption et aux autres tentations humaines.
Evidemment, la mise en place ne se fera pas sans heurts et sans victimes. Ce systeme choquera a ses debuts, et il ne tiendra qu'a nous, a le repandre dans nos contrees, creant ainsi un conseil mondial des sages.

Depuis longtemps, je pense, comme Andre Malraux, que "l'action vaut mieux que les petitions". Il est grand temps de passer a l'action. J'ai deja elabore une liste, premiere ebauche de ce que pourrait etre nos premier conseil belge des sages. A vous de l'amender, mais je ne doute pas qu'il fasse l'unanimite.

Composition du premier conseil des sages de Belgique:

-Michel Daerden, car pour controler le budget, il faut un homme sobre et de confiance
-Alain Destexhe, le seul homme de droite belge a succiter mon admiration
-Andre Urbain, pour son calme devant la camera et devant ses etudiants de l'ihecs
-Jean-Michel Zecca, pour ses blagues, toujours aussi tordantes et pleines d'esprit
-Justine Henin, pour son humilite et sa generosite
-Olivier Beaujean, parce qu'il faut bien un juriste, nondedjos !
-Luc Baugniet, car ainsi les jeux de mots pleuveront pendant les reunions
-Captain Kequet, pour ses remarques intelligentes sur la situation macroeconomique mondiale alliee aux turnover des entreprises transnationales.
-Mes 2 soeurs et ma maman, car ce sont les meilleures !
-Sebastien, parce que si je ne le cite pas, son ego va en prendre un serieux coup
-Antoine, pour apporter un peu de folie artistique a tout ce beau monde...

Ainsi soit-il, ceci constitue mon dernier post sur ce site. En espérant que vous aurez saisi la portée humoristique de ce post... Continuez a le visiter pour suivre les aventures sulfureuses du beau Antoine !

Santiag/Zib

Coromandel Park

Ainsi, les jours defilent, inlassablement. Mon fidele velo ne m'a toujours pas failli, ce qui est plutot une bonne chose, compte tenu de la durete de l'environnement routier de la peninsule du Coromandel. les cols et montees vertigineuses se succedent, et pas un jour ne passe sans que l'envie de m'asseoir a cote de mon velo me prenne, et de verser ainsi sur lui quelques larmes de decouragement. Mais apres une montee, il y a toujours une pente favorable. Ainsi, c'est toujours avec le meme entrain, et cette envie sans cesse renouvellee de capter des paysages magnifiques que je prends la route le matin...

Mais les coups de pedale n'ont pas sans cesse rythme mon periple sur l'ile du nord...ainsi,
il m'est arrive de chausser mes bottines de marche, et de m'attaquer au Park National du Tongariro, lieu bien connu du Mordor, cher a Peter Jackson. 4 jours de marche, dans un desert volcanique, agremente de rencontres enrichissantes et attendrissantes avec des quidam, venus chercher comme moi un peu de repos de l'ame. Quittant ces contrees, je suis invite par un jeune couple a Tauranga, velo et tout le package serres contres moi dans leur vehicule, a prendre part a une toute autre activite: le rafting ! l'equipage, au nombre de 7, compose de 2 irlandais, un coupe de maoris neo-zelandais et de nous 3, se soude a mesure que nous descendons les rapides vertigineux. Nous nous donnons rendez-vous en ville, et y passons la soiree ensemble, a y celebrer nos elans de bravoure, quand nous nous accrochions tant bien que mal les uns aux autres pour nous eviter de choir dans les eaux de la riviere Waia... La fin de soiree se passe etrangement. Un des irlandais fait le choix malheureux de se rapprocher charnellement de la femme maori. La mari, alors qu'il se rendait negligemment aux toilettes afin d'y satisfaire un besoin naturel, apercoit la scene, et soulage un besoin compulsif: Il applatit son poing massif sur le crane de l'irlandais pourfendeur. J'appercois le mari, reconduis par la securite; il parait comme un guerrier en plein AKA...les yeux haineux. Un peu plus tard, je raccompagne la femme en larmes a l'hotel, et echaffaude avec elles des plans rocambolesques pour tenter d'expliquer a son mari decu pourquoi elle se retrouvait avec un irlandais sur elle au milieu de la nuit. Je ne connaitrai jamais l'issue de cette action, mais une chose est sur, l'irlandais a bien voulu reconnaitre qu'il n'etait qu'un "fucking asshole'. Maigre consolation, mais qui aura le merite de me convaincre de conduire leur van, et de transporter ce 2 saouls en lieu sur, loin du mari furieux...

Le petit voyage a velo touche a sa fin. Arrive a Thames, j'y rencontre John, septagenaire, sans toutes ses dents, mais neanmoins en pleine forme. Il habite une carvane modestemment equipee dans le camping ou je me suis installe. Avec lui, les journees sont bien chargees. Nous travaillons dans les fermes de ses amis. Ainsi, j'arrache les mauvaises herbes, recolte les lait des vaches, avec comme arriere fond, a perte de vue, les collines boisees du Coromandel. Apres le travail, il m'emmene voir ses nombreux amis, et m'introduit aux joies des courses de chevaux ...
La ville est calme, et ses habitants vivent au rythme lent de ces petites villes reculees, ou pas une nouvelle venue de la capitale ne vient alterer le bien-etre ancestrale de cette ancienne cite miniere.

demain, je reprend mon velo, et reviens sur Hamilton, pour y faire mes adieux a ma maison ecologique... Ensuite, cap sur Auckland, pour y attrapper mon avion pour la Belgique, qui decollera ce 29 janvier. Beaucoup me demandent les raisons de mon retour. j'y consacre le prochain post...

Santiag/Zib